Le Rwanda est l’un des pays les plus côtés sur le continent Afrique que ce soit en termes d’environnement, de bonne gouvernance ou encore dévolution technologique. Ce qui nous intéresse aujourd’hui c’est comment les transactions financières se passent dans ce tout petit pays d’Afrique centrale. Quels sont les moyens de transfert disponibles au Rwanda et les frais appliqués ? Accrochez-vous, nous expliquons tout.
Le transfert d’argent à l’intérieur du pays
Le Rwanda est un petit pays subdivisé à 5 provinces dont 16 villes avec plus de 12,95 millions d’habitants. Comme la plupart de pays Africains, sa monnaie est instable. La population locale, majoritairement composée de cultivateurs, éleveurs et opérateurs économiques s’interchange les Francs Rwandais (Rwf) sous forme des transferts de fonds numérique. Auparavant, en ville comme dans des zones rurales, tout échange d’argent se faisait à la main. Aujourd’hui les choses ont beaucoup changé. Les moyens de transfert se sont multipliés à travers le pays pour faciliter les échanges. La grande partie de la population n’ayant pas de compte bancaire a accès aux services financières de base grâce au mobile money. Cesystème a largement contribué largement à l’inclusion financière. Quelques clics suffisent pour téléporter l’argent aux quatre coins du pays au moyen d’un simple téléphone portable.
Contexte de l’inclusion financière au Rwanda
Comme nous l’avons dit plus haut, le pays compte plus de 12.9 millions d’habitants. Plus de 90 pour cent vivent dans des zones rurales où les infrastructures bancaires sont faiblement implantées. Ainsi, moins de 15 pour cent de la population rwandaise dispose d’un compte bancaire. Comme pour le Congo, la plupart de paiements sont réglés en cash. Le petit nombre ayant un compte en banque compte des fonctionnaires d’états et quelques fortunés du pays.*
Le secteur de transfert d’argent mobile est en forte concurrence avec les banques et les services de transfert spécialisés tel que Western Union ou encore moneygram. Contrairement aux comptes bancaires, plusieurs habitants du Rwanda ont des téléphones mobiles. Les opérateurs de téléphonie mobile en profitent pour tenter de voler la vedette aux banques en apportant les services financiers aux plus démunis. Il est désormais plus facile et sans beaucoup de freins à l’entrée d’envoyer l’argent grâce à un simple téléphone; sans même la connexion internet, juste sa carte sim pour accéder aux services de transfert via SMS.
L’adoption de mobile money au Rwanda
Les mobiles money ont commencé à prendre du terrain en 2015. trois opérateurs de la téléphonie mobile se partagent le marché de transfert d’argent, il s’agit notamment de MTN, Airtel et Tigo qui reste encore moins utilisé dans le pays.
D’après les données de la RURA(Rwanda Utilities Regulatory Authority) qui datent de 2020, la valeur des fonds transférés via le Banking Mobile était en hausse de 45 pour cent entre le mois de Janvier et avril. Elle a atteint plus de 40 milliards de francs rwandais (RWF), une valeur estimée à 42 millions de dollars américains. Cela équivaut à une baisse significative de l’usage de l’argent liquide par la population rwandaise suite au dernier confinement.
Ainsi, le mobile money constitue à l’heure actuelle le moyen le plus utilisé pour les transferts d’argent à l’intérieur du pays. Ce succès du mobile money n’est pas anodin. En effet, le gouvernement rwandais a tendance à encourager les Rwandais à privilégier le mobile money. Comme vous pouvez le lire dans ce média local, début juin 2020, le gouvernement avait fait appel à tous les motocyclistes à n’utiliser que le mobile money. « Tous les motocyclistes de Kigali sont tenus d’utiliser des compteurs et des paiements sans numéraire tels que MTN MoMo ou Airtel Money » a rappelé la RURA (Rwanda Utilities Regulatory Authority).
Tarification du mobile money
Malgré l’accessibilité à grande échelle et les avantages qu’apportés le mobile money aux populations du pays de mille collines, les frais de transactions sont plus élevés avec une limite maximale de transfert évaluée à 2 000 000 RWF. Il en est de même pour le taux de change. Les utilisateurs vident leur compte aussitôt que les fonds sont disponibles dans le compte et les convertissent à l’argent liquide. En effet, il s’observe une course à la liquidité, ce qui fait que le taux de conversion du virtuel Mobile Money en cash est largement plus élevé que celui du cash en virtuel.
Les frais chez différents opérateurs:
- MTN MOMO: il est l’opérateur le plus sollicité au Rwanda avec des parts de marché allant au-delà de 40 pour cent des utilisateurs. Depuis fin avril 2021, l’opérateur MTN aurait même reçu l’approbation de la Banque Centrale du Rwanda (BNR) pour la création d’une filiale spécialisée dans les services financiers sur le mobile. Le but pour l’opérateur est d’améliorer ses services. S’agissant de frais de transferts P2P, ils sont de 1 à 2% pour les montants entre 1000 et 2 000 000 (environ 2000 USD) de franc rwandais (RWF). Pour les retraits d’argent, les utilisateurs de MTN paient 1,3% pour les montants entre 100 et 300 000 FRW. Au-delà de cette tranche, de 300 000 RWF à 2 000 000 RWF, ils déboursent jusqu’à 1.17 pour cent de frais. Pour plus de détails, nous vous invitons à lire cette grille tarifaire.
- Airtel Money : le réseau n’est pas beaucoup utilisé. Nous n’avons pas pu trouver les données en ce qui concerne leur tarification. Par contre, elle n’est pas très différente de celle appliquée par MTN Mobile Money.
A part les frais hyper élevés, il y a un problème d’interopérabilité entre opérateurs mobile money. Un client de MTN MOMO ne peut pas envoyer les fonds chez Airtel Money. Mais aussi, i y a des limites sur le montant à transférer, chez MTN par exemple, on ne peut pas envoyer plus de 2 000 000 RWF mais aussi seuls les agents ou revendeurs MTN peuvent effectuer plus de trois transactions par jour, ce qui représente une limite énorme.
Envoyer l’argent par la banque
Seule une poignée de Rwandais utilise d’autres systèmes de transfert d’argent en dehors du mobile money. C’est généralement pour transférer des montants très importants. Dans ce cas, les opérateurs utilisés sont soit les banques ou les postes de transfert. Les détenteurs d’un compte bancaire peuvent s’envoyer de l’argent par virement. Ils peuvent, par la même méthode, envoyer de l’argent à l’étranger.
Par ailleurs, la concurrence dans ce secteur se passe entre 11 banques implantées dans le pays, entre autres :
- La Bank of Africa
- Bank of Kigali : la plus ancienne du pays
- Cogebanque
- Crabe Bank
- Ecobank
- Equity
- Banque Populaire du Rwanda
- Kenya Commercial Bank
- GT Bank
- Urwego Opportunity Bank
- IꞚM Bank
Une grande partie de la population locale s’abstient de ses services. En fait, tout le monde n’a pas assez de revenus pour tenir un compte (25 dollars de frais chez Bank of Kigali) et supporter les frais mensuels.
Frais de transfert
Pour la Bank of Kigali, nous n’avons pas trouvé de tarif. Par contre, le minimum de dépôt est de 10 000 FRW ou son équivalent en devises étrangères et les frais de tenue de compte pour un particulier sont de 1000 RWF, environ 1 USD. Du côté de la Bank of Africa, les frais de virement varient entre 1000 RWF et 20 000 RWF (environ 20 USD).
Toutefois, les postes de transfert trouvent aussi des fidèles dans le pays, comme dans la plupart des pays africains. Ces postes sont des intermédiaires qui facilitent le transfert de la liquidité. Pour faire l’opération, il suffit de se munir de l’argent liquide que vous désirez envoyer, d’une carte d’identité et l’adresse du bénéficiaire. Il n’est pas obligatoire d’avoir un compte à la banque pour envoyer ou recevoir l’argent. Western Union domine largement ce secteur. Par contre, les frais sont très élevés. Ils atteignent souvent entre 10 et 15%.
Envoyer l’argent hors du Rwanda
Aujourd’hui, transférer l’argent du Rwanda vers l’extérieur est relativement facile. Le choix se se fait entre la banque, services spécialisés et le mobile mobile money; qui n’engage que les pays frontaliers.
Par virement bancaire
C’est le moyen le plus utilisé pour les détenteurs de compte à la banque, il est le moyen le plus sûr pour envoyer des grosses sommes. Il présente certaines limites notamment à terme de temps pour disponibiliser l’argent dans le compte du bénéficiaire qui peut aller jusqu’à 3 jours voire une semaine. Et l’obligation pour un receveur d’avoir un compte bancaire dans le pays de destination.
Les frais peuvent aller entre 1 à 2 pour cent chez Bank of Kigali pour une somme de 100 000 FWR, presque le même tarif pour Bank of Africa, Ecobank et Equity. Tout comme dans la plupart des pays, il est possible de faire une liaison du compte bancaire avec PayPal tant qu’on a une carte bancaire du genre Visa ou Mastercard. Malheureusement, il consomme trop des frais, il peut aller jusqu’à 15 pour cent.
Les services spécialisés
Aujourd’hui, avec les services spécialisés dans les transferts, il est possible à de nombreuses personnes, sans comptes bancaires, d’envoyer de l’argent à l’autre bout de la planète ou d’en recevoir. Ainsi, la majorité de rwandais sans compte en banque recourent à ces services pour déplacer de l’argent à l’étranger.
- Western Union : Western Union est présent dans plus de 200 pays au monde. L’agence permet d’envoyer de l’argent via son application mobile ou en déposant du cash à un agent. Au Rwanda, Western Union est l’un des moyens les plus utilisés pour faire sortir l’argent du pays. Par contre, le prix à payer est énorme. Si théoriquement l’expéditeur paie les frais de transaction, Western Union se paie également sur le taux de change. Prenons un exemple : quand un résident Rwandais envoie de l’argent au Congo via Western Union, il paie les frais de transaction. Cependant, malgré cela, le bénéficiaire ne reçoit pas l’intégralité du montant envoyé. Il doit payer des frais supplémentaires sur l’échange du Franc Rwandais en Franc Congolais et Western Union tire des profits de l’opération. Ces frais atteignent souvent entre 10 et 15% pour l’Afrique, un taux très différent des taux de change officiels.
- Mobile money: au Rwanda, comme dans plusieurs autres pays, le mobile money n’est pas très utilisé pour transférer l’argent à l’étranger. Toutefois, avec le réseau MTN, il est possible d’envoyer l’argent dans des pays plus proches. Il s’agit essentiellement de la Tanzanie, l’Ouganda, le Kenya et la Zambie. Mais aussi, WorldRemit et Azimo offrent ce genre de services. Il s’agit des applications qui jouent l’intermédiation entre les mobiles money des différents pays pour tenter de limiter les désavantages liés à l’absence d’interopérabilité. C’est ainsi qu’avec MTN Mobile Money par exemple, il est possible d’envoyer de l’argent au Ghana, en Côte d’Ivoire, en Zambie, en Ouganda, etc. mais ces opérations nécessitent un accès à l’internet et plusieurs procédures supplémentaires.
Envoyer l’argent de l’extérieur vers le Rwanda
En 2020, la diaspora africaine a envoyé plus de 42 milliards de dollars en Afrique subsaharienne. Les services spécialisés comme Western Union, Moneygram, WorldRemit et Azimo s’accaparent en eux seuls les deux tiers du marché, suivis de banques. En effet, l’essentiel de la population africaine ne dispose pas de comptes bancaires. C’est pourquoi, malgré les frais de virement entre 1 à 2 pour cent, la population préfère se tourner vers les agences (WU, Moneygram, etc) dont les coûts de services sont très élevés (entre 5 et 15% de frais).
Accès inégal aux services d’envoi des fonds
Comme nous l’avons renseigné plus haut, le Rwanda compte un peu plus de 12 millions d’habitants dont la majorité vit en zone rurale. Ainsi, l’implantation des agences financières n’est pas équitablement répartie sur le territoire rwandais. Les banques, les bureaux de changes et d’autres infrastructures financières sont largement concentrés dans les grandes villes à l’instar de Kigali, Musanze ou encore Gisenyi.
Ainsi, il existe des entités dépourvues de banques et même d’agences mobile money; c’est en tout cas ce qu’affirme ce rapport d’un média local. Malgré cela, l’adoption de la téléphonie mobile a beaucoup évolué dans le pays. Plus de 45 pour cent de la population rwandaise possèdent leur propre téléphone, ce qui laisse croire que l’usage du mobile money est voué à progresser dans le pays.
Le problème avec le transfert d’argent au Rwanda
Certes, les banques, le mobile money et les agences spécialisées dans les transferts d’argent contribuent largement à l’inclusion financière au Rwanda. Cependant, ils ne sont pas sans défauts. En fait, certaines limites constituent une véritable barrière à l’entrée. Il s’agit notamment de/du/des :
- Frais de transfert très élevés;
- Concentration des services en milieu urbain;
- Risque élevé de censure;
- La limite des transactions (autour de 2000 USD);
- L’absence d’interopérabilité entre les opérateurs mobile money;
- la pluralité des monnaies;
Ce que bitcoin peut changer
Alors que le système traditionnel peine à se faire accepter auprès d’une grande partie de la population rwandaise et cela pour des raisons évidentes (frais, limites d’envoi, absence d’infrastructures en milieu rural), bitcoin pourrait constituer un dernier rempart pour une inclusion financière plus libre dans le pays.
En effet, l’invention de Satoshi Nakamoto résout la majorité de problèmes que nous avons cité plus haut. Tout d’abord, bitcoin est accessible à tous. Il suffit d’un smartphone, une connexion internet et le téléchargement d’un simple portefeuille mobile pour être en mesure d’envoyer de l’argent partout dans le monde et sans demander aucune permission.
Etant décentralisé, bitcoin ne fonctionne sans aucun tiers de confiance. Cela élimine toute possibilité de censure sur les transactions. Mais aussi, l’impact d’un tel modèle se fait ressentir sur les frais de transactions qui sont très bas, l’absence de surveillance par un gouvernement ou une entreprise privée mais aussi, le protocole bitcoin n’impose aucune limite de transactions. Les règles sont fixées par les utilisateurs, loin des projecteurs des instances gouvernementales et tout changement possible est opéré en accord avec les utilisateurs.
Conclusion
Ces dernières années, le gouvernement Rwandais a multiplié les actions en faveur de l’amélioration de l’inclusion financière dans le pays. Outre les intentions positives, la situation s’améliore sur le terrain. En effet, le Rwanda gagne de plus en plus de place au sein des pays Africains où transférer l’argent n’est pas un casse tête. De nombreuses startups du secteur n’hésitent pas à s’installer dans le pays, ce qui justifie le fait que les choses évoluent dans la bonne direction. Par contre, le plus grand frein à l’adoption des systèmes de transfert d’argent vient des entreprises qui proposent ce service. En effet, elles facturent des frais exorbitants aux populations déjà très pauvres.
Bon marché, transparent, décentralisé et sans permission, bitcoin a tout d’un dernier espoir pour le peuple Rwandais. Avec l’invention de Satoshi, la population rwandaise peut être incluse financièrement tout en restant libre, épanouie et souveraine sur la façon de faire les échanges.